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Aups, une petite ville ouvrière du Haut Var en 1848

Source: Archives Départementales du Var 16 M 1

  Les industries existantes dans le canton d'Aups sont, à savoir: la tannerie, la poterie, la chapellerie et le tour sur bois.
  Ce sont les seules industries qui aient un caractère de spéculation et qui travaillent pour l'exportation*.
  Le canton d'Aups compte 170 ouvriers environ: savoir:

Hommes : . . . . 130
Femmes: . . . . . 10
Apprentis: . . . . 30

  L'âge auquel les garçons entrent en apprentissage est de 15 à 16 ans, celui des filles est de 12 à 13 ans. La durée de l'apprentissage est de deux ans.
  Les apprentis sont reçus gratuitement; quand ils sont nourris et logés chez le maître, ils payent une indemnité qui varie de 200 à 250 francs… Dans la tannerie et la chapellerie, les apprentis reçoivent, dès le premier jour, un salaire qui, de 60 centimes s'élève graduellement jusqu'à un franc…

  Les industries sont en général stagnantes et bornées aux besoins des localités, à part la tannerie qui a une importance réelle.
  Dans les travaux de l'industrie, lamoyenne du salaire de la journée de travail est de deux francs pour les hommes et de 75 centimes pour les femmes.
  Dans les travaux de l'agriculture, la moyenne est de un franc cinquante centimes pour les hommes et de 60 centimes pour les femmes.
  La commission a été d'avis qu'il fallait, pour pouvoir vivre, savoir: à un ouvrier seul 450 francs par an, et à un ouvrier en ménage, avec femme et deux enfants en bas âge, 800 francs par an.
  Les ouvriers dans le canton sont logés et vêtus proprement; leur nourriture est saine.
  Ceux qui jouissent le plus d'aisance sont les tanneurs-corroyeurs qui gagnent 4 francs par jour, tandis que les tisserands, les tailleurs et les cordonniers, dont le salaire dépasse rarement 1 fr 50, sont le plus souvent exposés à la gêne…

  L'instruction est peu répandue parmi les travailleurs. La génération qui arrive, en fréquentant les écoles gratuites, apprendra en général à lire et à écrire. Mais actuellement parmi les ouvriers, les deux tiers et parmi les agriculteurs un tiers, savent lire et écrire.
  Les femmes, on le comprend, sont encore moins avancées; dans la classe artisane 20 sur 100 et parmi les cultivateurs 5 sur 100 savent lire et écrire.
  L'instruction religieuse est satisfaisante. Le peuple est animé de sentiments honnêtes et moraux. Il est à regretter qu'on ne s'occupe pas de l'instruction professionnelle; on pourrait la développer au moyen d'une école gratuite d'arts et métiers dans chaque canton.
 Le nombre d'heures dont se compose la journée de travail varie dans chaque industrie:

Les maréchaux et les menuisiers travaillent: 13 heures
Les chapeliers et serruriers . . . . . . . . . . . . . . . .12 heures
Les tanneurs et les potiers . . . . . . . . . . . . . . . . .11 heures
Les maçons et les cordonniers . . . . . . . . . . . . . 10 heures
Les agriculteurs ne travaillent que . . . . . . . . .7 heures

*C'est à dire que les produits ne sont pas seulement destinés à la consommation familiale et locale, mais aussi à la vente à l'extérieur du canton.

Note complémentaire: Soucieuse des problèmes sociaux, la Constituante de 1848 avait décidé le 25 mai l'ouverture d'une grande "enquête sur la question du travail agricole et industriel", faite à l'échelon cantonal sous la direction des juges de paix. Cette enquête se poursuivit pendant tout l'été 1848; si elle ne fut suivie d'aucun effet pratique en raison de l'évolution politique ultérieure, elle n'en reste pas moins pour nous une précieuse source de renseignements. Voici quelques extraits du rapport concernant Aups (arrondissement de Draduignan, Var), petite ville qui sera le théâtre de violents incidents provoqués par le coup d'Etat du 2 décembre 1851 et l'insurrection des républicains.

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